Réformes législatives et enjeux de mise en œuvre 2024–2025

Réforme de la loi du 26 juin 1990 : relative à la protection imposée à une personne atteinte d’un trouble psychiatrique

En date du 16 mai 2024, la loi modificatrice portant diverses modifications relatives à la protection de la personne des malades mentaux  est entrée en vigueur.

La modification de la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux, en application à partir du 1er janvier 2025,  introduit des modifications et des mesures visant à améliorer la prise en charge des patients tout en réduisant les diverses contraintes imposées à ces derniers : réduire le traumatisme et la stigmatisation, clarifier la notion de trouble psychiatrique, réduire le recours à la procédure d’urgence, utiliser un modèle standard pour les rapports médicaux, impliquer la personne et son environnement et introduire le traitement volontaire sous conditions.

Parmi les principales évolutions, le traitement volontaire sous conditions permet désormais aux patients de suivre un plan de traitement de soins sans privation de liberté, à condition de respecter les critères définis. Une période d’observation clinique de 48 heures est également instaurée pour évaluer plus sereinement la situation des patients avant de prendre des mesures de privation de liberté, offrant ainsi une approche moins brutale et plus adéquate. De plus, l’extension du champ d’application de la loi, avec le passage de « maladie mentale » à « troubles psychiatriques », élargit désormais le nombre de personnes concernées par ces mesures.

Malgré ces avancées, la révision de cette loi soulève plusieurs défis. L’un des plus préoccupants est la saturation des services d’urgence des hôpitaux généraux, déjà surchargés, qui devront intégrer ces nouvelles mesures. L’introduction de « lieux sûrs » pour l’observation clinique, qui incluent potentiellement des institutions résidentielles de compétences régionales crée également des défis de gestion,  car ces structures ne sont pas toujours adaptées à l’accueil de patients psychiatriques dans le cadre de mesures de protection et d’évaluations cliniques. 

Réseaux Santé mentale 107 adultes, nouvel appel à projet : « Projet psychiatrie d’urgence de proximité 24h/24 et 7j/7 avec fonction de triage et fonction d’évaluation clinique et d’observation » 

Fin 2024, un nouvel appel à projet a été lancé pour les réseaux 107 adultes en santé mentale, visant à organiser une réponse de crise 24h sur 24, 7 jours sur 7. 

Depuis 2010, les équipes mobiles sont actives au sein des réseaux adultes. Ce projet tend à les réorganiser autour de deux axes : un fonctionnement continu 24h/24 et 7 jour sur 7, et un renforcement de la collaboration avec la médecine générale et les services de police.

Cependant, ce projet suscite des inquiétudes : l’intervention 24 h/24 ne semble pertinente que dans des crises aiguës, et les moyens alloués sont jugés insuffisants pour couvrir les besoins. De plus, les projets pilotes en santé mentale souffrent de sous-financements chroniques, ce qui met en péril la pérennité des réseaux. Les fédérations ont exprimé leurs préoccupations fin 2024, alertant le gouvernement sur les risques associés à un financement insuffisant et à un changement soudain de dessein des équipes mobiles.

La prise en charge des enfants et adolescents : un défi intersectoriel

En ce qui concerne la prise en charge des enfants et adolescents, un protocole d’accord pour améliorer la collaboration entre les secteurs de la santé mentale, le secteur des personnes en situation de handicap et de l’aide à la jeunesse a été signé par l’ensemble des ministres compétents du Royaume.

Ce protocole vise à mieux gérer les jeunes « à la croisée des secteurs », souvent négligés ou mal pris en charge, en raison de la discontinuité des services. Cependant, les efforts de concertation entre les différents secteurs restent insuffisants, ce qui complique l’application de solutions efficaces sur le terrain. Ces lacunes organisationnelles risquent de limiter l’impact des réformes, et la difficulté d’assurer une prise en charge cohérente pour ces jeunes vulnérables demeure un défi majeur à relever dans les années à venir.

Décret « Santé mentale » et ses enjeux

Au 1er janvier 2024, la législation wallonne en matière de santé mentale, a franchi un cap important avec la parution du décret du 10 janvier 2024 modifiant le Code wallon de l’action sociale et de la santé concernant la santé mentale et ses services actifs en Wallonie et de l’arrêté du gouvernement wallon du 25 avril 2024 modifiant le Code réglementaire wallon de l’action sociale et de la santé concernant la santé mentale et ses services actifs en Wallonie.

Depuis juillet 2014 (VIème Réforme de l’État), les plateformes de concertation en santé mentale, les maisons de soins psychiatriques et les initiatives d’habitations protégées relèvent de la compétence de la Région wallonne. Le décret Santé mentale intègre et adapte les critères d’agrément de ces matières dans le Code wallon de l’Action sociale et de la Santé d’une part. 

D’autre part, il modifie le chapitre 2 du titre 2 de la partie décrétale du Code wallon de l’Action sociale et de la Santé en ce qui concerne les services de santé mentale. 

Enfin, ce décret introduit un plan wallon pour la santé mentale ; le décret Santé mentale apporte une nouvelle dynamique au secteur, notamment en termes de maillage des services et de projection à moyen et long terme pour les soins aux patients. Cependant, il comporte également une lourdeur administrative qui pourrait nuire à la prise en charge des patients, en augmentant le temps consacré aux tâches administratives au détriment des soins directs.

Plan wallon pour la Santé mentale 

Bien que le Plan wallon pour la Santé mentale soit mentionné dans le décret, il reste au stade d’intention fin 2024. Sa mise en œuvre concrète débutera en 2025, avec un processus de co-construction impliquant les acteurs de terrain pour définir les priorités et les actions à mettre en place.

Implémentation de l’IFIC et accord non marchand wallon

En 2024, la mise en œuvre de l’IFIC dans les entités fédérées arrive à son terme. Mais cette transition n’a pas été sans difficultés administratives. Après plusieurs négociations, l’IFIC est intégré avec les mesures qualitatives de l’accord non marchand wallon, telles qu’une augmentation de personnel au sein des MSP (Maison de soins psychiatriques) et le financement du coordinateur IHP (Initiative d’habitation protégée).

Revalorisation des maisons de soins psychiatriques (MSP)

Une avancée importante en 2024 concerne la revalorisation de la sous-partie B1 des MSP. Un budget de 1 million d’euros est désormais intégré dans le prix de journée des MSP, offrant ainsi une bouffée d’oxygène, bien que cela ne résolve pas entièrement le sous-financement estimé à 3 millions d’euros.

Bilan mitigé des mesures « Get up »

Les mesures «Get up», mises en place dans le cadre du plan de relance, arrivent à leur terme fin 2024. Leur bilan, notamment après la crise du COVID, est mitigé, avec une faible capacité à objectiver les plus-values tant qualitatives que quantitatives. Le financement de ces mesures reste insuffisant pour couvrir l’ensemble des coûts salariaux. La pérennisation de ces mesures en 2025 reste incertaine, en attendant une évaluation complète.

Réhabilitation et dynamisme du secteur santé mentale

Le secteur de la réhabilitation connaît un dynamisme accru en 2024, avec des initiatives permettant de mieux répondre aux besoins locaux des patients. La Commission CRF (Conseil Régional de la Formation) de l’AViQ  joue un rôle clé dans ce développement. De plus, l’ouverture de nouvelles places d’initiatives d’habitations protégées (IHP) est saluée, bien que des efforts supplémentaires restent nécessaires pour répondre aux besoins.

Zones désertiques et problématique des assuétudes

La question des zones désertiques en matière de soins de santé mentale reste un défi majeur, avec des zones qui manquent de services répondant aux besoins locaux. En parallèle, la problématique des assuétudes, et en particulier la consommation de drogues illicites, devient un enjeu central en matière de santé publique. Il est urgent de mettre en place des réponses structurelles pour y faire face à court, moyen et long termes.

Prise en charge des enfants médico-psycho-sociaux (MPS)

Un débat a été initié sur la prise en charge des enfants MPS, souvent hospitalisés pour évaluer des cas de maltraitance ou de carences. Ce groupe de patients, qui représente un véritable enjeu pour les hôpitaux et le secteur de la santé mentale, souffre d’un manque de réponses structurelles adaptées. Ce débat se poursuivra en 2025, avec l’objectif de définir une nouvelle politique pour cette prise en charge au sein de nos hôpitaux généraux et des services en amont et en aval de cette hospitalisation.

Le Conseil fédéral des établissements hospitaliers a validé ce type de prise en charge comme un des 10 besoins prioritaires pour l’année 2025.

Pour 2025 : stabilisation et structuration du secteur

L’enjeu majeur pour 2025 réside dans la stabilisation et la structuration pérenne du secteur, notamment sur le plan budgétaire. Il est impératif de trouver des solutions pour stabiliser le financement et garantir une prise en charge de qualité pour tous les patients, dans un contexte de besoins croissants et de financement insuffisant.

Notre secteur Santé mentale en quelques chiffres :

UNESSA fédère 71 structures affiliées en Wallonie.

SM Wallonie.jpg

Type de services :

SM Structures.jpg

SSM – Service de santé mentale
HPS – Hôpital psychiatrique
IHP – Initiative d’habitation protégée
MSP – Maison de soins psychiatriques
RF – Rééducation fonctionnelle

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