Au nom des établissements de soins qu’elle représente, la fédération UNESSA annonce qu’elle a voté contre la proposition de budget soins de santé 2026, soumise aux instances de l’INAMI. Le projet actuel transfère l’essentiel de l’effort vers les hôpitaux, sans mesures concrètes pour réduire leurs charges au même rythme. En l’état, il met en péril l’emploi, l’attractivité des métiers et l’accessibilité des soins. UNESSA propose des pistes alternatives.

Nos soins de santé fonctionnent sur base d’un budget prédéterminé. Quand le nombre de patients augmente, le budget ne suit pas de manière proportionnelle. Ainsi, l’État a estimé qu’une augmentation maximale de 2% du budget des soins de santé sur un an était la limite, quel que soit le nombre supplémentaire de patients à prendre en charge. Pire, ces 2% légaux ont été rabotés à 0,8% par le biais de montants « interdits à dépenser » (réserves, gels budgétaires). 

Cette tension inédite sur le budget n’a pas permis au Comité de l’assurance de ce jour d’arriver à un accord pour l’an prochain. Et, UNESSA a rejoint la majorité des représentants des prestataires de soins, opposés à cette proposition de budget.

Un effort démesuré reposant sur l’hôpital
Les mesures envisagées initialement imposaient un choc d’au moins 200 millions d’EUR sur 2026 (environ 50 millions directement sur l’hôpital de jour, et plus de 170 millions via les honoraires, les implants et la pharmacie). Malgré quelques atténuations en fin de parcours, l’impact global demeure intenable pour un secteur aux marges déjà comprimées.

Des coupes transversales de fait
Malgré l’intention affichée d’éviter des mesures linéaires, plusieurs restent prévues, sans trajectoires graduées, ni garde-fous opérationnels (guidelines opposables, indicateurs, phasage).

Des conséquences concrètes délétères
En l’état, le budget proposé entraînera rapidement des répercussions sur l’emploi et la qualité des soins : gel d’embauches, licenciements, surpression sur des équipes déjà en tension, décrochage d’attractivité. Tout ceci influera indubitablement sur un malaise déjà profond au sein des équipes, avec des conséquences sur les maladies de longue durée en leur sein et la désertion des métiers de soins.

L’offre de soins en sera dégradée. Les délais de consultation vont encore s’allonger, il y aura des fermetures partielles d’activités moins « rentables », des renvois ambulatoires pourraient être mal couverts, et on constatera une hausse probable des suppléments d’honoraires en chambre individuelle — la dernière variable d’ajustement quand tout le reste est figé.
« On ne peut pas baisser les recettes hospitalières tout en laissant intacts — voire laisser croître — les coûts récurrents et fixes. Sans une ‘neutralité économique’, la seule soupape qui subsiste, ce sont des licenciements ou l’augmentation des suppléments d’honoraires en chambre individuelle. Or, c’est précisément ce que nous voulons éviter. », explique Philippe Devos, Directeur général d’UNESSA.

« Pax Hospitalia » 2026–2028
UNESSA plaide pour des mesures d’apaisement du secteur, de prévisibilité et de collaboration : 
 

  • Une neutralité économique immédiate. Toute économie imposée à l’hôpital doit obligatoirement s’accompagner d’une réduction concomitante et mesurable de ses charges (achats groupés nationaux, quotas/biosimilaires, plafonds énergétiques, co-financement cybersécurité, clauses de révision dans les marchés publics, aide à la récupération des factures impayées par les patients…). À défaut, un mécanisme explicite de neutralisation doit se mettre en place.
  • Un partage équitable de l’effort entre intra/extra-muros et industrie, sans report sur l’hôpital : les corrections de l’industrie (pharmaceutique et de technologie médicale), doivent rester à charge des industriels (sans rebasculer sur l’hôpital via la pharmacie hospitalière, par exemple).
  • Le lancement, endéans les 3 mois, d’« Assises des soins raisonnables », soit 12 mois de travail, pour déterminer des objectifs coconstruits et mesurables, ainsi que des guidelines. À l’agenda : « déprescriptions », conditionnements adéquats, pertinence en imagerie médicale/biologie clinique, régulation des soins urgents, parcours recommandés et responsabilisation financière de tous les partenaires. Les outils existent (PROMES, trajectoires par profils) ou sont en voie de préparation (aide digitale à la prescription), utilisons-les sérieusement.
  • La régulation de la demande en première ligne sans stigmatiser : 
    a.    L’indexation partielle du ticket modérateur (en dehors des patients BIM), sur des prestations initiées sans prescription pour réduire les usages non pertinents.  
    b.    La régulation de ce qui se « déverse » sur l’hôpital, soit envoyé par la première ligne (imagerie, second avis, biologie...), soit qui y arrive (urgences, imagerie de rattrapage). 

Propositions pour 2026
Outres les contours d’une « Pax Hospitalia », UNESSA propose différentes mesures pour 2026. Elles sont, avant tout, inspirées par le pragmatisme et non par un dogme idéologique quelconque :

  • Pratiquer des achats groupés nationaux (de molécules-médicaments/consommables critiques, d’énergie, de cybersécurité), avec des clauses de sauvegarde. Les effets sur les charges hospitalières seront directs et quantifiables.
  • Établir des forfaits et des guidelines « opposables » sur des actes à forte variabilité (imagerie, actes per-opératoires standardisés), avec un phasage pour sécuriser les pratiques de qualité.
  • Établir un plan « soins raisonnables » : évaluer des « déprescriptions » encadrées (examens diagnostiques, médicaments), placer des « filtres intelligents » en première ligne, recourir à des outils de prescription numériques... Le tout devant faire l’objet d’une évaluation ex ante/ex post (PROMES, indicateurs INAMI).

UNESSA se tient à disposition de toute autorité souhaitant avancer selon ces différentes propositions.
 

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